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Publié le: 08/05/2012

Deux personnes qui boivent l'eau avec des calebasses. Photo : Pacôme Tomètissi

Fifonsi vient de puiser de l’eau à la rivière. Faute de mieux, c’est cette eau qui lui sert de boisson. C’est avec cette eau qu’elle cuira la tisane que lui a indiqué le guérisseur traditionnel. Hier, elle a été renvoyée du centre de santé le plus proche situé à 10 km à Kpataba dans la commune de Savalou. Elle est incapable de se payer les soins.

Cette fois-ci elle n’a même pas les moyens de s’acheter les médicaments de rue. Elle fait partie des 56% de femmes béninoises vivant en dessous du seuil de la pauvreté. Elle n’a pas d’alternative. Elle fait partie des 80 % de Béninois qui se ruent vers les tradi-praticiens. Elle ne sait pas que c’est cette eau non potable qui lui cause sa fièvre typhoïde. Elle fait partie des 37% de populations sans accès à l’eau potable et des près de 70 % d’analphabètes. Elle n’a aucune idée des droits auxquels elle a droit.

L’eau et les inégalités

Comme Fifonsi, ils sont des millions de Béninois à ne pas avoir accès à  l’eau potable. Selon une enquête démographique et de santé (EDS) effectuée en 2006 par l’Institut national de la statistique et de l’analyse économique (INSAE), environ 9.9 % de ménages boivent l’eau des marigots ou des mares au Bénin. Dans les milieux ruraux, ils sont 12.7%. De plus, 22% de ménages et 26%  de gens dans les zones rurales vivent à plus de trente minutes des points d’eau. Quant aux enfants de moins de 5 ans, 11.3% d’entre eux doivent se contenter des eaux de ruissellement, de marigots ou de mare. 94% de l’eau ne subit aucun traitement avant d’être bue et sur les 6% de ménages restants, à peine 4.2% utilisent des méthodes de traitement appropriées.

L’eau potable, un droit ?

L’absence de latrines devrait  accentuer l’insalubrité de l’eau. Dans les milieux ruraux, 81.3% de gens n’ont  pas de toilettes donc se mettent à l’aise dans la nature. C’est dans cette même nature que se retrouvent les marigots, les eaux de ruissellement et les mares qui servent d’abreuvoir à certains ménages et au bétail.

Houéhanou est cultivateur à Savalou dans le département des collines au centre du Bénin. Il estime que l’eau des marigots est plus douce et plus agréable que celle des puits. « Elle est fraiche et claire, insiste-t-il. Si cette eau tue moi je serais déjà mort. J’ai deux femmes et beaucoup d’enfants. Et puis je suis heureux. Il y a quelques années, il y avait le ver d Guinée. Aujourd’hui c’est terminé ». Les populations ne font donc pas toujours  le lien entre leur cadre de vie et leur santé ou encore entre les inégalités et leur condition de vie. Elles ne réalisent pas l’importance des causes structurales (les institutions sociopolitiques) ou intermédiaires (conditions de vie, comportements non citoyens) dans la santé ni que c’est leur droit de disposer de l’eau potable en plus d’un système d’assainissement adéquat et le devoir du gouvernement de le leur assurer. Le gouvernement du Bénin a signé des accords internationaux et des traités.

Le comité de suivi de la Convention internationale sur les droits économiques, sociaux et culturels a rendu publiques des recommandations dont les observations générales 15 qui décrivent les conditions de mise en œuvre du droit à l’eau. L’Etat a le devoir d’approvisionner les populations en eau potable et celles-ci ont le droit d’en bénéficier de façon libre et sans condition aucune.

La mise en œuvre de la santé pour tous implique des actions sur les déterminants sociaux de la santé y compris dans le secteur de l’eau où travaillent plusieurs organisations de la société civile comme le CBDIBA ou encore Water For All Children Africa qui aident les populations à avoir accès à de l’eau potable. Le régime d’assurance maladie universelle ne sera efficace que s’il est accompagné d’actions plurisectorielles. Le droit à l’eau et à un environnement sain est un chemin inévitable vers le droit à la santé.

Pacôme Tomètissi

Histoire envoyé pour le concours 2012 (2ème édition)

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