Publié le: 06/11/2013
Deux jours durant, les participants ont examiné les problèmes et les solutions liés à 3 thématiques importantes : le suivi et le contrôle des autorités publiques, le financement du renouvellement et le développement du réseau et du service.
L’AEPS est un système d’adduction d’eau potable constitué d’un château d’eau desservant un ou plusieurs bornes fontaines. Au Burkina Faso, la réalisation d’une AEPS est encouragée pour les villages d’au moins 3500 habitants et les chefs-lieux de communes. Tout comme les PMH (pompe à motricité humaine) communément appelés forages au village, dont la gestion est transférée aux communes depuis l’adoption en 2006, de la nouvelle politique de gestion décentralisée des ouvrages d’eau potable, l’AEPS tombe également sous la gestion des municipalités.
Cependant, depuis la mise en œuvre de cette politique, aucune réunion d’échanges entre les acteurs stratégiques n’a été organisée pour faire l’état de la gestion des AEPS au Burkina. Tous constatent de nombreux problèmes sans pourtant avoir l’opportunité d’échanger sur les solutions et stratégies à adopter en vue d’assurer des services durables. L’atelier d’échanges et de réflexion sur la gestion des adductions d’eau potable simplifiée s’inscrit dans la réflexion globale nationale sur les AEPS.
C’est pourquoi tous les acteurs, à commencer par l’Etat, saluent l’organisation de cet atelier. Pour Sori Alassoun de la Direction Générale des Ressources en Eaux (DGRE), « cet atelier est important pour nous car le plus difficile n’est pas de réaliser des ouvrages mais d’assurer la pérennité des services et l’appropriation par les ouvrages », dit-il dans son discours d’ouverture. L’atelier s’arrime à la présentation d’une étude menée par l’IRC sur « le coût, la performance et la régulation des petits réseaux de distribution d’eau potable au Burkina Faso ». L’étude a concerné 6 AEPS de la région du sahel. Elle a abouti à des conclusions parfois surprenantes. Les auteurs affirment qu’à long terme, il est plus rentable de réaliser des AEPS plutôt que des PMH dont les coûts d’entretien s’avèrent exorbitants pour des services de moindre qualité. L’étude explore par ailleurs, tous les autres aspects de la gestion des AEPS, du niveau et de la qualité des services fournis.
Pour enrichir les échanges sur le sujet, en plus de la présentation de l’étude d’IRC, la Direction Générale des Ressources en Eau (DGRE) a fait une présentation du cadre règlementaire de gestion des ouvrages publics d’eau potable. Les opérateurs (ONEA, Vergnet Hydro et PPI) et les maires des communes de Markoye, Gorgadji, Latoden et Houndé ont fait l’état de leurs expériences de la gestion des AEPS. Ces expériences diverses ont servi aux participants de centrer les débats sur des préoccupations réelles constatées sur le terrain. Les échanges tournaient autour des trois problématiques retenues par les organisateurs à savoir : le suivi et le contrôle par les autorités publiques, le financement du renouvellement et développement du réseau et du service.
Des discussions, plusieurs problèmes ont émergés au nombre des quels le non suivi des indicateurs de performance notamment le suivi des rapports produits par les opérateurs. Les services de l’Etat qui devraient leur venir en aide n’ont pas encore une démarche systématisée qui leur permette d’apporter un appui aux communes. De plus, il y a une absence d’instance et de mécanisme de suivi. Comme solution, les participants proposent de mettre en place un système de suivi technique et financier sous la supervision de la DGRE, de la DREAHA et de la commune. En absence de textes identifiant clairement qui des acteurs doit supporter le coût du suivi, il a été proposé que l’Etat finance cette opération dans un premier temps. Les communes et les opérateurs prendront le relai après.
En l’absence d’un cadre institutionnel garantissant la viabilité des AEPS, les participants souhaitent que l’Etat mette en place une structure de régulation. Quant aux ruptures de service observées, la commune est invitée à jouer pleinement son rôle de maître d’ouvrage en interpellant et en suivant l’opérateur. Elle doit aussi veiller à ce que le tarif de l’eau soit réaliste de sorte à permettre au système de bien fonctionner.
Concernant le volet du financement du renouvellement, le principal problème réside dans la mauvaise compréhension du mécanisme décrivant les rôles des co-contractants (commune et opérateur), dans la constitution de fonds renouvellement. Sur le champ, la DGRE a donné des explications précises : « c’est le fermier qui a en charge la constitution de fonds de renouvellement qu’il rétrocèdera à la commune à la fin de son contrat ». Pour résoudre le déficit permanent de certains centres, les participants suggèrent de passer à l’intercommunalité qui permettra une mutualisation de la gestion des réseaux.
Pour le dernier volet, l’extension du réseau, tous les acteurs pointent du doigt le problème de disponibilité de la ressource en eau souterraine qui est parfois insuffisante, voire absente. Dans de telles conditions, la solution pourrait venir d’une action concertée entre l’Etat, les opérateurs ; la commune et ses partenaires. Les communes pourraient mises en interconnexion avec les centres urbains. Quant au financement des travaux d’extension, la commune, ses partenaires, les ONG et le fermier doivent s’impliquer davantage pour aider l’Etat qui est responsable de ce volet.
Pour que toutes les propositions ne restent « lettre morte », les participants se sont engagés à les porter dans tous cadres de discussions et de prise de décisions au niveau national. Ainsi, certains ont-ils proposé de reverser les conclusions de l’atelier dans les travaux de la revue à mi-parcours du Programme National d’approvisionnement en eau potable et assainissement (PN-AEPA). « Il faut travailler à ce que l’administration publique inscrive la problématique de la gestion des AEPS dans l’agenda de la revue à mi-parcours du PN-AEPA/PAGIRE », suggère Aboubacar Zougouri, de la coopération danoise.
Interpelée par les communes sur le transfert des allocations de fonds qui ne correspondraient pas à une base réaliste, l’administration publique s’engage à mettre une place des mécanismes idoines de transfert et d’assurer un suivi-accompagnement rapproché pour permettre aux municipalités d’utiliser l’argent à bon escient. « Nous pensions que le suivi des fonds transférés était à la charge du ministère de l’administration territoriale », avoue Ruth Sow, de la DGRE. « Désormais, nous assurerons ce suivi », poursuit-elle. Son collègue Jean Oubda renchérit : « au sein du ministère nous sommes en phase de mise en place d’un service de suivi des fonds transférés aux communes ».
De leur côté, les opérateurs sont en attente de solutions concrètes de sorte à améliorer leur conditions de travail sur le terrain. « Ce type d’atelier est important car il nous permet de faire remonter nos préoccupations. Nous avons soulevé des problèmes précis et je suis en attente de réponses rapides. Je suis totalement intéressé par les résultats de l’atelier et je m’engage à participer aux futures réflexions », confie Christophe Leger, de l’entreprise Vergnet Hydro.
IRC soutient l’amélioration du monitoring des services d’eau potable dans le cadre du projet Triple-S, une composante du programme pour l’eau potable et assainissement de l’USAID, WA-WASH.