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Publié le: 27/02/2012

Par Eddy Patrick DONKENG

Quelques années après la guerre civile, les conséquences d’un assainissement médiocre et du manque d’eau sont nombreuses sur la santé de tous et en particulier des femmes et des enfants. 11/20 c’est la note attribuée au Liberia par l’Unicef et WaterAid en 2011 en matière d’assainissement. Au delà d’une simple note, dans les principaux bidonvilles de la capitale libérienne, Clara Town et West Point, l’eau tue.
Dans la majorité des capitales africaines à l’exemple de Monrovia, il existe de sérieux problèmes d’accès à l’eau potable et d’assainissement. Chaque année dans ce pays, 2900 enfants meurent des suites de diarrhées. Les quartiers populaires sont de grandes zones endémiques, dont la forte densité démographique aggrave la situation.

Les structures de santé ne bénéficient pas toujours des ressources nécessaires pour assurer les services auprès des populations. Les femmes et les enfants sont les victimes les plus touchées par cet état de chose. Au cours de la matinée du mercredi 15 février 2012, des journalistes spécialisés aux questions d’accès à l’eau, l’hygiène et l’assainissement de 14 pays d’Afrique ont fait une descente sur le terrain. Clara Town et West Point ont été leurs centres d’intérêts.

Les réalités ne sont pas très différentes, nous choisissons de nous focaliser sur West Point. Plusieurs bidonvilles de Monrovia sont des bidons vides situées le long des rives marécageuses polluées du fleuve Mensurado, près du centre-ville de Monrovia. La population n’a pas d’autre choix que de déféquer aux abords des plages, du fleuve ou encore dans des sachets qui sont ensuite balancées dans ce même fleuve qui produit l’essentiel du poisson de la ville.

Les fosses septiques sont en général construites en matériau provisoire et gérées par des privées. Elles débordent régulièrement et la vidange coute à la communauté d’environs 40 000 âmes, 100 dollars américains deux fois par semaine. Les ordures brûlantes s’entassent un peu partout entre les égouts entourant les latrines boueuses.

En cas de maladies, la capacité des centres de santé est insignifiante devant les nombreux cas d’enfants qui y arrivent malnutris, souffrant de diarrhée et de déshydratation critiques. L’eau qui sert à tous les usages quotidiens à West Point, tue.

Dans le véhicule qui nous y conduit, Patricia journaliste du Togo laisse dire : « vraiment il n’y a pas de différence dans les villes africaines ». Propos renchérit par Drissa du Burkina-Fasso ; « la même chose ». A ces mots, je retrouve également le quartier Deido de la capitale économique du Cameroun. Après un entretien avec le Commissaire (autorité municipale), nous faisons le tour du quartier guidé par le commissaire et son assistant à la communication. « La solution consiste à refaire tout complètement. » Ils  reconnaissent pourtant la difficulté de cette mesure : « déloger les populations reviendrait à trouver des structures pour les reloger. »

Les populations n’ont pas apprises à se construire en incluant des toilettes. Elles sont encouragées à construire des toilettes communautaires ou privées payantes. Cinq dollars libérien pour l’utilisation. Après un tour complet, nous nous rendons au Centre de santé de West Point.
C’est un petit centre construit il y a une dizaine d’années pour servir une communauté de 10 000 membres, et pourtant multiplié par quatre aujourd’hui. Trois jeunes femmes attendent dans la toute petite salle d’attente. Une autre ressort tenant par la main un plus jeune.
Selon Martha la mère, Karim son fils à quatre ans et demi et aurait de la fièvre. La case de santé ne reçoit la visite du médecin qu’occasionnellement. C’est donc l’infirmière principale qui assure la relève. Elle hésite à nous accorder quelques minutes, et finalement répondra à une de nos préoccupations.
Selon Mme Constancia, « l’enfant qui vient de sortir est toujours maladif. Comme lui, les enfants sont réguliers à la case pour les mêmes causes. » Un enfant libérien sur neuf en effet, meurt avant son cinquième anniversaire, soit 110 sur 1 000 naissances vivantes, selon l’Enquête démographique de santé au Libéria en 2007.
Environ 39 pour cent des enfants sont chétifs ou trop petits pour leur âge. Les principales causes de décès sont le paludisme, la diarrhée et les maladies respiratoires. « Les maladies enregistrées fréquemment sont liées à la consommation d’aliments souillés » affirme le Médecin généraliste de l’Hôpital JFK de Monrovia. Mais la cause directe reste l’utilisation de l’eau du fleuve Mensurado très polluées. Indirectement il faut y voir le manque d’eau. Mr Nashirou de WaterAid évoque la nécessité d’un programme d’éducation à la propreté corporelle et environnementale.

Notre emploi de temps ne nous aura pas permis de rencontrer le responsable de « Liberia Water and Sewer », la Société d’eau et d’assainissement du Libéria. Mais des habitants de West Point affirment que la société s’atèle depuis des années à reconnecter les tuyaux détruits pendant des décennies de guerre civile. Les coupures d’eau sont fréquentes et peuvent mettre des jours voire des semaines. Les habitants dont le revenu est très modeste ne peuvent donc pas se permettre l’alternative de l’eau minérale. Une jeune fille dit avoir des règles douloureuses et pensent que la cause soit la mauvaise qualité d’eau consommée.

Ce qui les empêchent d’aller a l’école quand cette période arrive. Pendant notre entretien, c’est un autre jeune homme qui arrive. De son accent anglais pas très audible, nous apprenons tout de même qu’il rentre de classe avant la sortie parce qu’il est malade. Il est tout pale et la blessure sur les lèvres nous permet de croire à un paludisme mal soigne ou en phase initiale quoi qu’il se tienne a peine debout et soutient son ventre pendant le bref échange.

Une décision politique de soins de santé publique gratuits à travers le pays pour les enfants de moins de cinq ans a été adoptée. Mais au delà, des efforts restent à fournir pour l’accès universel aux soins de santé et à l’eau pour tous les libériens. Au cas contraire, à Monrovia, West Point tout comme dans les capitales africaines, l’eau continuera de tuer.

Nouvelles analogues : Un mauvais système d’assainissement qui tue les jeunes, par Rebecca Murray, IPS, 2011.

Source : L’eau et l’assainissement en Afrique de l’Ouest journalistes Network, mars 2012.

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